Bart Deplancke, laboratoire de biologie systémique et de génétique à l’Institut interfacultaire de bioingérierie, EPF Lausanne

Le spécialiste en biotechnologie Bart Deplancke et son équipe de chercheurs de l’EPF Lausanne ont mis au point une technique basée sur la microfluidique, baptisée SMiLE-seq, qui pourrait révolutionner la recherche en génétique. Le recours à des méthodes nouvelles et inclusives leur a permis de développer un système rendant considérablement plus rapide, précise et efficace la caractérisation de protéines de liaison à l’ADN, que l’on appelle facteurs de transcription (FT). Les résultats de ces recherches ont récemment été publiés dans la revue Nature Methods.

Les gènes sont la pierre angulaire de la synthèse des protéines. Pour initier ce processus, les gènes doivent d’abord être transcrits en acide ribonucléique (ARN) à partir de l’ADN. Cela exige une vaste famille de protéines de liaison régulatrices nommées facteurs de transcription (FT). L’appréhension du mécanisme de liaison à l’ADN des facteurs de transcription (FT) est essentiel pour expliquer la logique de transcription dans une cellule et comprendre ainsi l’influence de la variation génomique sur les processus de régulation des gènes. Toutefois, en raison même de leur nombre, de leur capacité à se combiner en des paires différentes et de la difficulté technique que présente l’étude de leurs propriétés de liaison à l’ADN en laboratoire, les facteurs de transcription sont encore largement méconnus.

Les mammifères ont entre 1300 et 2000 facteurs de transcription, dont beaucoup se combinent avec d’autres en hétérodimères de manière à lier les gènes et induire leur transcription en ARN. Comme un facteur de transcription peut se lier à divers FT selon le type de cellule dans laquelle il est actif, le nombre de combinaisons possibles est très élevé. «Il faut en outre comprendre leurs propriétés de liaison à l’ADN ainsi que leur affinité et leur spécificité pour l’ADN, et cela comprend aussi les hétérodimères», explique Bart Deplancke. Il s’agit là d’un aspect déterminant pour pouvoir exploiter à l’avenir les facteurs de transcription à des fins biotechnologiques ou pharmaceutiques. Malgré des efforts considérables pour identifier les spécificités de liaison à l’ADN des FT, moins de la moitié des FT humains ont été caractérisés expérimentalement jusqu’ici, et seulement une fraction des 3000 à 25 000 hétérodimères.

Le groupe de recherche de Bart Deplancke à l'Institut interfacultaire de Bioingénierie de l'EPFL, a donc élaboré SMiLE-seq, une technique semi-automatique basée sur la microfluidique permettant d’accélérer considérablement l’identification de facteurs de transcription formant des mono et hétérodimères. Cette technique associe approche expérimentale et modèle informatique. «Le nouveau modèle permet un certain gain de temps, réalisant en moins d’une heure ce qui nécessitait plusieurs jours auparavant», explique Bart Deplancke. Jusqu’à présent, les chercheurs ont déterminé les propriétés de liaison à l’ADN de plus de 60 facteurs de transcription d’humains et d’organismes modèles, dont neuf nouveaux facteurs. A l’avenir, on envisage d’exploiter la polyvalence de cette technique pour d’autres molécules telles que l’ARN. L’équipe de Bart Deplancke a déposé une demande de brevet et en même-temps une start-up sera lancée pour commercialiser le concept de SMiLE-seq.

Né à Courtrai (Belgique) en 1975, Bart Deplancke a fait des études de génie biochimique à l’Université de Gand (Belgique). Il a ensuite effectué son doctorat en immunologie intestinale à l’Université de l’Illinois à Urbana-Champaign (Etats-Unis). En tant que post-doctorant, il a passé un an au sein du département de biologie oncologique du Dana-Farber Cancer Institute, un centre de recherche et de traitement de renommée internationale dépendant de la Harvard Medical School à Boston, Massachusetts (Etats-Unis). Bart Deplancke a ensuite décidé de poursuivre son activité de recherche sur la fonction et l’expression génique et a effectué pour cela un programme post-doc de quatre ans en médecine moléculaire à la faculté de médecine de l’Université du Massachusetts, Worcester (Etats-Unis). Entre 2007 et 2014, Bart Deplancke a été professeur-assistant en biologie systémique et génétique à l’Institut de bioingénierie de l’Ecole polytechnique fédérale (EPF) de Lausanne. Il a été promu professeur associé en 2014.

Alina Isakova, Romain Groux, Michael Imbeault, Pernille Rainer, Daniel Alpern, Riccardo Dainese, Giovanna Ambrosini, Didier Trono, Philipp Bucher, Bart Deplancke. SMiLE -seq identifies binding motifs of single and dimeric transcription factors.Nature Methods 16 January 2017. DOI: 10.1038/nmeth.4143