Prof. Dr. Dr. Hans-Uwe Simon, Institut de Pharmacologie de l’Université de Berne
Vous êtes-vous déjà demandé ce que fait notre corps des anciens composants cellulaires ? En principe, la même chose que notre intestin: il les digère. Ce processus se nomme autophagie. Il permet à notre corps de garder un équilibre entre synthèse et dégradation. L’autophagie, de manière semblable à l’apoptose (le processus de mort contrôlée le plus fréquemment utilisé par notre corps), est une réponse de la cellule au stress. Les cellules présentant une erreur ou étant devenues inutiles, comme les cellules constituant la palmure présente entre les doigts au stade embryonnaire, sont dégradées. Pendant longtemps, on ne savait pas si l’autophagie pouvait directement déclencher l’apoptose. En 2006, le Prof. Simon et son groupe de recherche ont démontré que le clivage de la protéine ATG5 (Autophagy-related gene 5) par l’enzyme calpaïne déclenche l’apoptose. ATG5 joue donc un rôle important au niveau de l’autophagie et de l’apoptose. C’est à ce moment-là déjà que le Prof. Simon s’est rendu compte de l’importance de cette découverte pour le développement de thérapies anti-cancéreuses.
« Les cellules tumorales de mélanome malin présentent une autodigestion diminuée. La tumeur profite de cette caractéristique pour s’établir plus rapidement. », explique le Prof. Hans-Uwe Simon. En 2013, les chercheurs ont découvert, par le biais de cultures cellulaires, que la protéine ATG5 est la cause de l’autodigestion diminuée au niveau de ces cellules cancéreuses. Une étude rétrospective, portant sur 194 patients atteints de mélanome, a confirmé ces données. « La liaison d’un nombre aberrant de groupes méthyls au promoteur du gène codant pour la protéine ATG5 en réduit l’activité et permet ainsi à la tumeur de croître. », ajoute le Prof. Simon. Le but est donc d’identifier des substances capables de réactiver l’expression du gène ATG5 au niveau des mélanocytes (cellules pigmentaires) et d’ainsi éviter le développement du mélanome. De telles substances sont actuellement testées par le Prof. Simon et son équipe.
Une chimiothérapie n’est, dans la plupart des cas, pas suffisante pour vaincre le cancer. En complément, des séances de radiothérapie sont souvent nécessaires afin de détruire les cellules tumorales. Les cellules cancéreuses utilisent le processus d’autophagie pour résister à la chimiothérapie : certaines de ces cellules entrent en état de « catastrophe mitotique », un état où la division cellulaire n’est pas menée jusqu’au bout. « Nous avons pu démontrer un rapport direct entre l’autophagie et la catastrophe mitotique. », souligne le Prof. Simon. Les chercheurs ont découvert que les cellules se trouvant en état de catastrophe mitotique suite à la chimiothérapie peuvent être directement poussées à l’apoptose par l’utilisation de substances bloquant l’autophagie. « Les substances testées ont permis l’activation de protéases responsables du déclenchement de la mort cellulaire programmée », rajoute le Prof. Simon.
Le Prof. Dr. Dr. Hans-Uwe Simon est né en 1958 à Eisenach. A la suite d’études de médecine à l’Université de Jena, il a travaillé comme post-doctorant dans le domaine de l’immunologie dans les cliniques universitaires de l’Université de Toronto, du Mount Sinai Hospital et du Toronto General Hospital. Il s’est ensuite rendu à l’Université de Zurich où il a alors travaillé comme chef de projet puis directeur adjoint du Swiss Institue of Allergy and Asthma Research. Il a reçu en 2001 son deuxième titre de doctorat pour son travail de recherche effectué à l’Université de Jérusalem. Depuis l’an 2000, le Prof. Simon est Professeur ordinaire à l’Université de Berne et Directeur de l’Institut de Pharmacologie. Depuis 2012, il est également Vice-doyen de la recherche à la Faculté de Médecine. Le Prof. Simon a également été nommé Professeur invité à l’Université de Rome pour l’année académique à venir. Il est membre de l’Académie Allemande des Sciences Leopoldina et de l’Académie Suisse des Sciences Médicales.