Prof Michele De Palma, Swiss Institute for Experimental Cancer Research (ISREC), Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne (EPFL)

L’immunologie des tumeurs est aujourd’hui l’approche la plus prometteuse dans la lutte contre le cancer. Le principe: stimuler le système immunitaire pour qu’il détruise les cellules cancéreuses de manière ciblée. Jusqu’ici, l’immunologie des tumeurs n’a toutefois fonctionné qu’auprès d’une minorité de patients atteints du cancer. Michele De Palma s’est spécialisé dans ce domaine. Les résultats de ses recherches jouent un rôle important dans la compréhension de l’interaction entre les cellules immunitaires et le cancer. Pour les remarquables performances de ses recherches, il s’est vu décerner en 2017 le prix Robert Wenner, doté d’un montant de CHF 100 000.–.

Les cellules cancéreuses se servent de notre système immunitaire et l’exploitent à leur avantage pour se développer et se propager dans notre corps. L’un des principaux défis de la lutte ciblée contre le cancer consiste par conséquent à trouver et détruire ces cellules modifiées sans viser les cellules intactes. En 2013, l’immunologie des tumeurs a permis de réaliser une percée dans le traitement du cancer. Cette thérapie stimule notre système immunitaire pour qu’il attaque les cellules cancéreuses, les rendent vulnérables et potentiellement curables.

Michele De Palma avait déjà découvert, dans le cadre de son doctorat, que les tumeurs exploitent un certain groupe de cellules immunitaires, les macrophages, qu’elles en prennent possession et les transforment en «macrophages associés aux tumeurs» (TAM). En particulier, il a découvert que certains de ces TAM stimulent l’angiogenèse tumorale de telle sorte qu’ils aident les tumeurs à développer un réseau de vaisseaux sanguins, lequel est essentiel pour la croissance et la propagation du cancer. Dernièrement, Michele De Palma a concentré ses recherches sur la manière dont les TAM inhibent la réaction immunitaire contre le cancer. Son équipe a découvert que les TAM produisent des acides nucléiques courts (micro-ARN) qui provoquent le comportement néfaste des TAM. En 2016, l’équipe a démontré qu’un groupe de micro-ARN, appelés let-7, est responsable de cette fonction inhibitrice du système immunitaire. «Lorsque nous avons désactivé la fonction de let-7 dans les TAM, nous avons été positivement étonnés de constater que non seulement les cellules cancéreuses étaient à nouveau reconnues par le système immunitaire, mais aussi qu’elles ne pouvaient plus se propager», explique Michele De Palma. Cette découverte, publiée dans le journal Nature Cell Biology, a permis le développement de médicaments qui attaquent let-7 dans les TAM de façon ciblée. Toutefois, il reste bien du chemin à parcourir avant leur utilisation.

Actuellement, Michele De Palma se consacre à l’optimisation de vaccins à base de cellules dendritiques pour lutter contre le cancer. Comme les macrophages, les cellules dendritiques font partie de notre système immunitaire. Leur rôle consiste à déceler les corps étrangers dans notre corps et à les présenter à un autre groupe de cellules immunitaires, les cellules tueuses T. Celles-ci attaquent ensuite les cellules cancéreuses et les détruisent. Jusqu’ici, les vaccins à base de cellules dendritiques n’ont pas produit les résultats souhaités car ils sont trop peu personnalisés. Michele De Palma et son équipe ont récemment développé une méthode pour permettre aux cellules dendritiques de déceler des protéines personnalisées (antigènes tumoraux). Pour cela, ils ont introduit des protéines artificielles (EVIR, récepteurs extracellulaires à vésicule internalisée) dans des cellules dendritiques. Celles-ci ont alors reconnu de petites vésicules (exosomes) qui sont naturellement libérées par les cellules cancéreuses. Ces vésicules contiennent les protéines personnalisées nécessaires pour renforcer la réaction immunitaire des cellules tueuses T et accroître l’efficacité des vaccins à base de cellules dendritiques. Les données de l’étude ont été publiées dans Nature Methods en janvier. «Nous collaborons actuellement avec le Centre hospitalier universitaire vaudois afin de tester notre technologie dans le cadre d’essais cliniques», confirme Michele De Palma.

Michele De Palma est né en 1973 en Italie, où il a étudié la biologie à l’University of Torino Medical School. Cette université lui a également décerné son titre de docteur en 2004 pour ses travaux concernant l’implication des macrophages dans l’angiogenèse tumorale. Il s’est ensuite concentré sur le domaine de la thérapie génique contre le cancer au Telethon Institute for Gene Therapy (TIGET), à Milan. Avant d’être appelé comme professeur assistant à l’ISREC de l’EPFL en 2012, Michele De Palma a été chef de groupe au San Raffaele Scientific Institute de Milan. Michele De Palma a déjà reçu deux ERC Grants (en 2009 et 2016).