La Suisse joue un rôle clé dans la recherche sur les organoïdes. Cela a été clairement démontré lors du 4e atelier Next-Gen Organ-on-Chips & Organoids, qui s’est tenu à Pratteln, près de Bâle, et auquel ont participé des institutions de recherche de premier plan. Toutefois, pour rester compétitive au niveau international, un soutien à la recherche à long terme est essentiel. Des programmes comme le Fonds national suisse (FNS), Innosuisse et le Centre suisse de compétence 3R (3RCC) sont indispensables pour faire progresser l’innovation dans ce domaine. Un débat politique sur le niveau de soutien financier et de régulation de ces développements par l’État prendra de plus en plus d’importance dans les années à venir.
La génétique comme base de la recherche sur les organoïdes
Le développement et l’utilisation des organoïdes sont étroitement liés aux méthodes modernes de génie génétique. Les organoïdes sont souvent issus de cellules souches pluripotentes induites (iPS), qui peuvent être modifiées génétiquement afin de créer des modèles spécifiques de maladies. Cela est particulièrement important pour l’étude de maladies génétiques telles que la mucoviscidose ou le cancer. En outre, des technologies comme CRISPR-Cas9 ouvrent de nouvelles possibilités pour étudier et corriger de manière ciblée des mutations génétiques dans les organoïdes, ce qui pourrait révolutionner les approches thérapeutiques à long terme.
Un domaine révolutionnaire
Depuis environ quinze ans, il est possible de produire des organoïdes individuels, tels que des organoïdes intestinaux, cérébraux ou tumoraux. Désormais, il est même possible de combiner différents types d’organoïdes pour créer des "puces multi-organes". Ces modèles permettent de traiter des questions plus complexes. Par exemple, les organoïdes tumoraux vascularisés – c’est-à-dire contenant des vaisseaux sanguins – permettent d’étudier plus précisément les processus tumoraux. La barrière hémato-encéphalique, un tissu complexe protégeant le cerveau contre les toxines, peut être modélisée en combinant plusieurs organoïdes. Le modèle peut ensuite être utilisé pour tester la perméabilité de certains médicaments. En combinant différents tissus, y compris des cellules immunitaires, il est même possible de construire une sorte de système immunitaire in vitro, sur lequel peuvent par exemple être testées des vaccinations.
Applications des organoïdes
La mucoviscidose est une maladie causée par une mutation génétique spécifique. En clinique, il est souvent difficile de trouver la thérapie adéquate pour chaque patient. Tester différentes combinaisons de médicaments directement sur le patient est long et pénible. C’est pourquoi une approche de médecine personnalisée a été adoptée : des organoïdes cultivés à partir de tissus provenant directement du patient sont utilisés pour tester diverses combinaisons de médicaments. La combinaison la plus efficace in vitro est ensuite appliquée au patient. Le même principe est utilisé chez les patients atteints de cancer : en testant des traitements directement sur des organoïdes dérivés du patient, on peut trouver plus rapidement et plus efficacement la thérapie appropriée.
Les organoïdes sont également utilisés en recherche préclinique : des criblages de médicaments peuvent être effectués directement sur des tissus humains. On espère ainsi une translation plus rapide vers la clinique, comparée à l’utilisation de modèles animaux ou de lignées cellulaires.
Dimension politique de la recherche sur les organoïdes
L’utilisation des organoïdes en recherche et potentiellement en thérapie soulève des questions éthiques et réglementaires. Bien que les organoïdes offrent la possibilité de réduire les expérimentations animales, il reste nécessaire de définir des lignes directrices éthiques claires concernant l’utilisation de tissus humains et les modifications génétiques. Les débats politiques sur la protection des données des patients, la gestion des altérations génétiques et les conditions-cadres pour les essais cliniques seront donc inévitables.
(Photo : Madeline Andrews, Arnold Kriegstein's lab, UCSF)
