1. janvier 2015

Le Prof. Dr méd. Adriano Aguzzi, directeur de l’Institut de neuropathologie, Hôpital universitaire de Zurich

Le Prof. Dr méd. Adriano Aguzzi est un coryphée dans le domaine de la recherche sur les prions. Il appartient, avec plus de 500 publications dont certaines ayant été citées plus de 38000 fois, au top des chercheurs; et cela même en dehors de nos frontières. Adriano Aguzzi et son équipe cherchent à comprendre comment les prions du corps se déplacent jusqu’au cerveau, où ils exercent leur effet néfaste. La recherche de pointe du Prof. Adriano Aguzzi a été récompensée à maintes reprises par des prix de grand renom.

Les prions sont des glycoprotéines. Il s’agit de protéines auxquelles un groupe oligosaccharide est lié. Ces protéines sont présentes chez les humains comme chez les animaux. Des prions endogènes inoffensifs peuvent, par le bais de changements structurels, devenir pathogéniques. Ces prions pathogéniques sont responsables du développement d’encéphalopathies spongiformes transmissibles, telles l’ESB ou la maladie de Creutzfeldt-Jakob. Les dommages cérébraux engendrés par de telles maladies sont tellement importants que le cerveau prend la forme d’une éponge. La protéine Prion (PrPC) fait partie de notre membrane cellulaire et est une des protéines les plus communes de notre corps. Par le biais d’une interaction protéine-protéine, la protéine originelle PrPC se transforme en sa forme pathogénique PrPSC. Cette forme pathogénique s’accumule dans le cerveau et perturbe la fonction neuronale. PrPSC est un agent fortement infectieux, au contraire de la forme endogène PrPC qui n’a pas d’effet toxique. Cette découverte importante, le Prof. Adriano Aguzzi l’a publiée il y a déjà plusieurs années, en collaboration avec le Prof. ém. Charles Weissmann. «L’accumulation de protéines déformées joue aussi un rôle décisif dans le développement de maladies telles qu’Alzheimer et Parkinson. Notre recherche fournit donc des données importantes permettant d’agir au niveau de la prévention, du diagnostic ou encore de la thérapie de telles maladies», explique le Prof. Aguzzi.

La manière exacte dont l’accumulation de protéines pathogéniques mène à la perturbation de la fonction neuronale a été longtemps obscure. C’est à la fin de l’année 2013 que le Prof. Aguzzi et son équipe ont publié le mécanisme biologique lié à ce processus. Si un type précis d’anticorps se lie à la tête des prions, cela pousse la queue des prions au développement d’un signal toxique, endommageant ainsi les cellules nerveuses. «Grâce à la découverte de ce mécanisme biologique, nous avons maintenant un outil en main pour tester la capacité de certaines substances à agir contre l’agglomération des protéines pathologiques, ainsi que pour étudier, par le biais de cultures cellulaires, le développement des maladies à prions», explique le Prof. Aguzzi.

En plus de la transformation spontanée de la forme physiologique PrPC en sa forme pathologique PrPSC, cette dernière peut aussi être acquise par le biais de la nourriture. «On a pu démontrer que les molécules pathologiques peuvent être transportées jusqu’au cerveau par le biais de l’intestin et du système lymphatique», explique le Prof. Aguzzi. Plusieurs années peuvent s’écouler entre le moment de la contagion et l’apparition de la maladie. La plupart du temps, les personnes touchées ne le savent pas et peuvent transmettre plus loin cette maladie. Au Royaume-Uni, environ 1 personne sur 2000 est aujourd’hui infectée par la maladie de Creutzfeldt-Jakob. «Pour cette raison, l’alimentation animale devrait se passer de farines animales. Celles-ci représentent la plus grande source de prions pathogènes connue», souligne le Prof. Aguzzi.

Son succès, le Prof. Aguzzi le doit aussi en grande partie à son équipe de 25 personnes. Etant donné que la moitié de l’argent que le Prof. Aguzzi a à disposition pour la recherche provient de fonds européens (Horizon 2020), une politique ouverte envers l’Europe est très importante pour lui et pour un grand nombre d’autres chercheurs en Suisse. Avec l’initiative «Pour une Suisse scientifique ouverte sur le monde», un groupe d’action a été créé afin d’ouvrir un discours public sur les préoccupations des chercheurs. «Pour nous, il est très important de montrer à quel point nous sommes connectés au niveau international et à quel point nous sommes impliqués dans des échanges à l’échelle mondiale», explique le Prof. Aguzzi.

Le Prof. Adriano Aguzzi est né en 1960 à Pavie, en Italie. Après avoir étudié la médecine aux Universités de Bâle et de Freiburg, il s’est rendu à l’Institut de pathologie moléculaire de Vienne pour un post-doctorat. En 1993, il a été nommé médecin-chef et privat-docent à l’Université de Zurich. Depuis 1995, il est le directeur du Centre de référence suisse pour les maladies à prions et, depuis 2004, le directeur de l’Institut de neuropathologie de l’Hôpital universitaire de Zurich. Le Prof. Aguzzi a été récompensé pour sa brillante recherche par le prix RobertKoch en 2003, par le prix AntonioFeltrinelli en 2009 et par le prix Hartwig Piepenbrock-DZNE, avec Charles Weissmann, en 2013.